C’est l’une des choses les plus élémentaires, et pourtant les plus difficiles à faire bien : savoir dire « non ». Que ce soit de ne pas les connaître, de ne pas les respecter ou de ne pas savoir les faire respecter, nos limites sont pourtant une réalité. Dans ce article, je vous invite à regarder plus en détail à ce petit mot de trois lettres, qui représente parfois un si grand défi. Nous verrons ensemble pourquoi c’est si difficile à dire, pourquoi cela peut être un problème, et comment apprendre à le dire, ce « non » nécessaire.
Article de Ketsia BONNAZ, publié le 6 septembre 2021
1. Pourquoi c’est si difficile ?
« Non » est l’un des premiers mots que les enfants apprennent à dire. D’ailleurs, on leur explique qu’il ne faut pas parler aux inconnus ou ne jamais suivre un étrangers même s’il a un joli chien et des bonbons dans sa voiture.
Paradoxalement, l’obéissance demandée par les parents – et les figures d’autorité – porte un message différent : c’est en faisant plaisir, en disant « oui » et en étant gentil que l’on s’attire la faveur des adultes. Les enfants ont besoin de limites pour se construire, mais selon l’éducation que l’on reçoit et la manière dont on la comprend, beaucoup d’entre nous se sentent davantage acceptés et valorisés lorsqu’ils disent « oui ». Par peur du rejet, ou peur de décevoir, on n’ose pas dire non.
Et puis, être serviable et souriant (enfin, surtout pour les filles), prouver que l’on peut faire davantage, suivre le mouvement c’est bien, non ? On ne voudrait surtout pas être autocentré, grognon, et s’attirer la désapprobation ou le jugement des autres. Par faible estime de soi, désir de plaire aux autres et de ne pas blesser, on n’ose pas dire non.
Le problème, c’est que nous avons trop de modèles de gens qui disent non de manière brutale, égoïste, sans empathie et parfois sans jugeote. Par manque de modèles sains de l’assertivité, on n’ose pas dire non.
Et parfois, on ne veut pas être pris en défaut, ou tout simplement nous ne savons pas estimer notre temps et nos ressources. Par peur de ne pas être à la hauteur et par méconnaissance de nos propres besoins et capacités, on n’ose pas dire non.
>> Vous reconnaissez-vous dans l’un ou l’autre de ces portraits ? Pouvez-vous identifier les mécanismes internes qui créent de la culpabilité, de la peur et/ou de la tristesse lorsque vous aimeriez dire « non » mais que vous n’osez pas ? La prise de conscience est déjà un grand pas vers la liberté !
2. Pourquoi ne pas savoir dire « non » est-il un problème ?
Ne pas savoir dire « non » c’est risquer de ne pas pouvoir vivre en adéquation avec ses valeurs, c’est manquer de respect à soi ou aux autres, et parfois, c’est risquer sa propre vie.
Demander au conducteur de ralentir, ou éliminer certains aliments de sa diète, ça peut être une question de vie ou de mort, ou pour être moins dramatique, de survie ou de vie.
Refuser de rire à une blague sur le poids d’une camarade de classe ou ne pas se faire rembourser un repas par son entreprise quand on sait pertinemment qu’il ne rentre pas dans les clous, c’est mener une vie où nos valeurs sont vécues, et pas seulement professées.
Expliquer à son chef qu’il ne sera pas possible de réaliser une tâche additionnelle parce que vous n’avez pas le temps, dire non à sa sœur qui demande un baby-sitter mais vous avez besoin de repos ce week-end-là, ou décliner une sortie au cinéma pour vous coucher plus tôt, c’est se respecter soi-même, et ses besoins.
Et puis, dire « non », c’est aussi parfois pour les autres : pour les enfants évidemment qui ne comprennent pas toujours les conséquences de leurs actes. Mais qu’en est-il de refuser d’encourager un ami qui dilapide son argent dans les jeux de hasard, ou conseiller à une amie d’aller lentement dans sa relation amoureuse parce que vous avez des doutes sur le petit copain ?
Bien entendu, tous les exemples cités ci-dessus sont hypothétiques et ne me sont jamais arrivés…
>> Je vous invite ici à considérer avec sincérité et sérieux les conséquences de se taire, ou ne pas se positionner : comment pouvez-vous relier votre besoin de fixer des limites dans certaines sphères de votre vie, et votre désir de vivre une vie saine et intègre ?
3. Apprendre à dire « non »
Alors, comment fait-on ? Je ne prétends pas ici avoir « LA » solution facile, d’autant que les changements de système de pensée sont rarement faciles. Voici cependant quelques pistes de réflexion :
Se connaître et identifier s’il est juste de dire « oui »
Quelques questions* pratiques lorsque vous sentez qu’il n’est pas approprié de dire « oui » face à une situation :
- Une demande a-t-elle été exprimée ?
- Est-ce de ma responsabilité ?
- Est-ce que j’en ai les moyens/les ressources ?
- Est-ce que j’en ai envie ?
- Est-ce que cela est en adéquation avec mes valeurs ?
Si vous répondez « non » à plus d’une des questions ci-dessus, vous avez le droit de dire non, ou de demander à préciser les choses.
Savoir poser des limites et faire des retours négatifs
Dans mon article sur les « Relations », j’aborde la question de savoir poser des limites. Trop souvent, nous avons tendance à prendre sur nous aussi longtemps que possible et un jour, tout explose (ou implose). Pourtant, il est possible de faire part aux autres de manière posée et constructive lorsque nous pensons qu’ils dépassent les bornes, que ce soit au travail ou dans la vie personnelle.
Cliquer ici pour l’article sur les Limites
Dans « Le coin des pros », je propose une Fiche intitulée « Donner une critique négative ». Je développe davantage la notion de limites et de feedback, autour de plusieurs éléments comme indiqué dans l’image ci-contre. Cela peut-être utile dans la sphère professionnelle comme privée !
Cliquer ici pour la Fiche « Donner une critique négative »
Les petits pas font les grands voyages
Soyez patient avec vous-même et n’hésitez pas à commencer avec des petits « non », afin de construire votre confiance en soi et de vous attaquer aux « non » plus importants. Et si vous ne l’avez pas vue, cette petit vidéo illustre très bien ce principe !
Et puis… parfois il peut être nécessaire de se faire accompagner, en en parlant à un proche et/ou à une professionnel.
>> A vos marques, prêts, affirmez-vous !
4. Un exemple de clarté dans les limites personnelles
J’ai lu récemment le roman « L’année où je t’ai rencontré » où l’auteure Cecelia Ahern décrit le concept des cercles, un système qui aide Heather, une jeune trisomique, à catégoriser les différents niveaux de relations personnelles et d’intimité physique. C’est une catégorisation « extrême » pour protéger une jeune femme qui a besoin de limites très claires, mais elle m’interpelle tout de même :
Le cercle privé violet représente l’individu – dans ce cas, Heather. Le cercle bleu du câlin vient ensuite. Il représente les gens qui sont le plus proche, à la fois physiquement et émotionnellement, et c’est là qu’il est normal de s’étreindre ; ce cercle inclut papa, Zara, Leilah et moi. Ensuite se tient le cercle vert des câlins lointains. Il concerne les amis proches et la famille éloignée. Certains amis veulent parfois être plus proches que ça mais Heather doit leur dire exactement quelle est leur place. Puis on trouve le cercle jaune des poignées de main, pour les amis et les connaissances dont on connaît le nom, suivi du cercle orange du « coucou » de la main pour les autres, les connaissances lointaines. Et enfin, il y a le cercle rouge des étrangers. Ni contact physique ni conversation ne peuvent être partagés avec les gens qui entrent dans cette catégorie, à moins qu’il ne soient identifiables par leur badge ou leur uniforme. Si quelqu’un essaie de toucher Heather alors qu’elle ne le veut pas, elle doit dire « stop ».
>> Votre « système des cercle » fonctionne-t-il suffisamment, dans vos relations interpersonnelles mais aussi dans les tâches que vous acceptez ?
5. Accepter le non des autres
Je ne m’adresse pas ici aux gros relous qui font des propositions indécentes aux femmes dans la rue (je doute qu’ils lisent ce type d’article…)
Grandir dans des limites saines, c’est non seulement connaître et faire respecter les siennes, mais aussi accepter celle des autres. Régulièrement, je me rends compte que nombre de mes questions aux autres sont en réalité de « fausses questions », de celles qui ne laissent pas vraiment le choix à mon interlocuteur dans sa réponse. « Ça te dérange si… », « C’est ok n’est ce pas ? », et tant d’autres en sont des exemples.
C’est simple : au-delà de la politesse, si je me vexe, si je me sens dévalorisé ou si je me mets en colère lorsque quelqu’un répond « non » à l’une de mes question ou proposition, c’est que je n’étais peut-être pas tout à fait honnête dans ma communication.
>> Cela vous arrive-t-il de poser des questions ou faire des suggestions en n’étant pas prêt à ce que l’autre dise « non » ? Pourquoi ? Comment pouvez-vous grandir en respectant davantage votre propre liberté, et celle des autres ?
Et, je ne peux pas terminer sans le dire : de la même manière qu’il est sain d’être intentionnel à savoir dire « non », apprenons aussi à dire « oui » ! Il y a tant de merveilles à découvrir et d’expériences à faire en sortant de la zone de confort !
Notes :
- *Questions inspirées de la boîte à outils pour sortir du rôle du Sauveur dans le triangle dramatique, concept de l’analyse transactionnelle
- « L’année où je t’ai rencontré » par Cecelia Ahern, éditions Milady, page 98 et 99
- Crédit photo : pixabay.com
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